M.A.D in love : le labyrinthe

À quelques pas du célèbre Louvre, le Musée des Arts Décoratifs cache bien son jeu. Au sein de cette bâtisse de 1862, six expositions temporaires se succèdent chaque année, aux côtés de la collection permanente. Pour cette saison estivale, le MAD met en lumière le Printemps Asiatique, la Naissance des grands magasins et la joaillerie de luxe. Reportage d’un lieu mythique.

Passé la grande porte du Musée des Arts Décoratifs, de grands escaliers en marbre blanc nacré se dessinent. Il est d’usage de se diriger vers la droite, pour découvrir émerveillés l’exposition temporaire principale. La Naissance des grands magasins est nichée dans l’aile droite du MAD, au troisième étage. Du 10 avril au 13 octobre 2024, il vous sera donné de voir l’évolution de la mode, du design, des jouets et de la publicité dans les mythiques enseignes parisiennes, de 1852 à 1925. Du Bon Marché au Printemps, en passant par les galeries Lafayette et la Samaritaine, embarquez dans une rétrospective de ces illustres boutiques que l’on croît trop bien connaître !

Bras ouverts à la Modernité

Qui aurait pu penser que les temples de la consommation ont vu le jour sous le règne de Napoléon III ? Pourtant, le Second Empire est bel et bien à l’origine de l’entrée dans la modernité que représentent ces cathédrales de l’industrialisation. Cette exposition dresse la frise chronologique d’une société française assoiffée de progrès. Elle immerge, au travers de 700 œuvres réparties dans sept petites salles, dans la perspective de croissance de cette époque, mêlée au libéralisme économique et à la vision de progression du commerce de détail. Si l’on doit l’apparition de ces grands magasins à l’émergence d’une classe sociale bourgeoise au pouvoir d’achat élargi, la facilitation des transports logistiques par le biais du chemin de fer et des voies fluviales a ouvert la société au mal du siècle suivant : la surconsommation.

Affiches publicitaires et accessoires du début du siècle dernier
© Loane Gilbert

Affiches, vêtements, jouets et pièces d’art décoratif nous attendent en haut des marches. Le style épuré des salles est cassé par les couleurs vives des posters publicitaires à l’esprit Art Nouveau et Art Déco. Au détour des allées, la mode est démocratisée par des mannequins vêtus de tenues portées jadis. Les tissus précieux se succèdent, tant pour les habits, que pour les accessoires. Ainsi, plumes, chapeaux et éventails constituent la garde-robe type des premiers consommateurs de ces grandes enseignes.

Dans le fond du couloir, la mode laisse place au mobilier de salon et aux jouets pour enfants. Tout un pan, désormais méconnu, de la diversité des produits présentés au siècle dernier est à découvrir. Les cris et rires des enfants semblent encore résonner dans les murs, fragments d’histoire et de souvenirs. La variété du catalogue de pièces à observer n’est pas proportionnelle à la superficie de l’exposition, comme quoi la taille ne compte pas lorsque l’intérêt est présent.

Enfilage de perles

Au sortir de cette rétrospective, la tentation est forte lorsqu’il s’agit de déambuler dans les couloirs de la galerie des bijoux. La visite se poursuit cependant dans l’autre aile du bâtiment, pour y découvrir ce que le musée a de plus beau à offrir. Alors que certaines ostensions prennent place dans la nef, cette fois-ci les objets de luxe du Printemps Chinois sont intégrés directement dans les collections permanentes du MAD.

Il s’agit ici de trouver ces artefacts asiatiques disséminés au milieu du mobilier d’autrefois. Le parcours commence sur les coursives des premiers étages. Le visiteur est piqué au vif par la curiosité de trouver ces objets, mais l’exploration des lieux devient vite un casse-tête chinois pour l’observateur mal avisé…

D’autant que la visite labyrinthique se poursuit du cinquième au neuvième étage. À soixante mètres d’altitude au-dessus des jardins du Luxembourg, mobilier vintage et design contemporain se confondent avec une sélection de pièces de haute couture et de joaillerie de luxe. Il n’est donc pas étonnant de découvrir le Chiffonnier Anthropomorphe de André Groult aux formes presque humaines côtoyer le costume Trompe-l’œil de Jean-Paul Gaultier et la robe Pleats Please du couturier japonais Issey Miyake. De même qu’un complet en velours Hermès prend place devant le sofa Banane de Jean Royère, conçu dans le même textile. L’envie de s’asseoir sur ces chaises et fauteuils de collection est prégnante tant l’escalade de ces cinq paliers est sportive.

Dans le Pavillon Marsan, le regard du visiteur peut se détourner quelques instants des salles garnies pour se plonger dans la quiétude de la vue imprenable des toits de Paris, du jardin des Tuileries, à la rue de Rivoli. Dans les dédales du MAD, difficile de ne pas tomber amoureux des œuvres d’art exposées sous nos yeux.

Loane Gilbert et Tristan Baez

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